La préparation mentale des skippers du Vendée Globe en 2024

Preparation mentale des skippers du Vendée Globe 2024

La préparation mentale des skippers du Vendée Globe se dévoile

A chaque départ édition, la question de la préparation mentale des skippers du Vendée Globe est évoquée. Les mentalités évoluent: alors qu’en 2012, lorsque je posais la question sur les pontons, peu en parlaient, en 2024, la préparation mentale des skippers est devenue incontournable. La grande majorité des marins ont compris l’intérêt de travailler en amont de la course et osent à présent en parler librement.

Pour cette édition, j’ai accompagné un skipper dans sa préparation, je peux donc vous parler des grandes lignes, sans entrer dans les détails car les coachings restent confidentiels!

Le Vendée Globe est une course exigeante de 70 jours pour les premiers, à plus de 100 jours pour les bateaux plus anciens.
Les techniques utilisées sont bien connues, le coach mental s’appuie sur le coaching professionnel, l’imagerie mentale, la PNL (programmation neuro linguistique), la relaxation, la sophrologie, l’hypnose, et d’autres approches qui ont fait leurs preuves dans les milieux extrêmes.

L’oeil de l’experte

5 points essentiels de la préparation mentale des skippers

  • 1.rendre les marins autonomes dans leur gestion quotidienne des situations de stress
    Quelques exemples de situation de stress rencontrées en course:
    En mer en solitaire, le danger est permanent. Les navigateurs sont soumis à un stress quotidien, qu’ils apprennent à gérer avec l’expérience. Cependant lorsqu’un événement inattendu survient, une collision avec un OFNI (objet flottant non identifié), une blessure, une violente tempête qui s’annonce, une casse matérielle, une bonne gestion des émotions et de l’anxiété est primordiale lorsqu’une décision doit être prise rapidement.
    Jean-Pierre Dick souligne l’importance de la respiration en situation d’urgence .
    Les différentes techniques travaillées lors de l’entrainement mental vont permettre au skipper de garder la lucidité nécessaire pour réaliser les manoeuvres adéquates et prendre les décisions appropriées.
  • 2.définir les bons objectifs, en relation avec leur potentiel du moment.
    Parmi les 40 skippers engagés pour ce Vendée Globe 2024, seuls quelques-uns sont préparés à jouer le podium. Le gros du paquet définit des objectifs comme :terminer la course, terminer en moins de 100 jours, finir dans les 10 premiers, ect. La formulation précise  de l’objectif va permettre de garder la motivation pendant l’entrainement et la préparation avant le départ, mais également pendant la durée de la course.
    Et cet objectif formulé sur la ligne de départ peut évoluer en fonction des circonstances de course (barrière météo, casse matérielle, fatigue). C’est donc important de développer les capacités d’adaptation, d’acceptation et de résilience.
    • 3.optimiser les gestes techniques pendant les manoeuvres, à l’aide de l’imagerie mentale.
      Sur les IMOCA, chaque manœuvre en solitaire est une grande dépense d’énergie. En fonction des conditions de mer et de vent, l’anticipation de chaque étape de la manoeuvre est donc essentielle. A l’entrainement, l’imagerie mentale permet de décomposer chaque geste pour optimiser son efficacité en situation réelle. A force de répétition, chaque détail est parfaitement assimilé et mémorisé. Ainsi, en mer, avant chaque changement de direction ou changement de voile, le skipper peut visualiser le déroulement complet de la manoeuvre, et anticiper d’éventuels problèmes qui pourraient avoir des conséquences sur sa sécurité ou celle du bateau.
  • 4.prendre conscience des limites physiques dans les situations d’urgence.
    En solitaire, les skippers sont en alerte permanente, et réagissent à chaque bruit de leur machine. Le sommeil est fractionné et les périodes de récupération sont rares.
    En situation d’urgence, la lucidité permet d’évaluer les dangers potentiels et d’éviter que la situation empire. Les skippers relatent l’apparition d’hallucination lors de fatigues extrêmes, et ils prennent alors conscience qu’il est temps de s’accorder un peu de repos. Il arrive qu’ils décident d’arrêter le bateau en plein océan (mise à la cape) pour aller dormir et reprendre des forces.
    La gestion de l’énergie physique et mentale est un point clé de la réussite sur la durée du parcours. Bien connaitre ses limites et ses réactions permet de repérer les premiers signes d’alerte avant qu’il ne soit trop tard.
  • 5.La préparation est longue et exigente
    Les projets sont préparés sur 4 ans ou plus, et toute une équipe travaille ensemble pour optimiser au mieux les performances du bateau.
    Pour cette édition, une procédure de qualification a été instaurée et les skippers doivent faire plusieurs courses en solitaire ou en binome pour se qualifier. La pression est permanente et le calendrier très serré. Entre les courses, les bateaux sortent de l’eau et sont en chantier. Comme pour une écurie de Formule 1, les meilleurs techniciens sont sollicités pour réparer, améliorer, inover, tester. La gestion humaine de l’équipe est très importante également, l’inteligence collective se met au service du projet, et le skipper reste le pilote.
    Dans les équipes à gros budgets, le personnel est suffisant pour que les tâches soient réparties.
    Dans les plus petites équipes, les hommes sont polyvalents et font preuve d’ingéniosité pour trouver les meilleurs compromis entre les coûts matériels et le gain de performance.
    Cette année, 2 marins qualifiés ne seront pas au départ, faute de place. La règle est stricte et évoluera encore pour 2028.

Conclusion

  • La préparation mentale des skippers du Vendée Globe commence bien en amont. Le mental se perfectionne au fil des mois et des années, en programmant des séances thématiques permettant d’aborder tous les sujets nécessaires.
  • Comme dans tous les sports, la préparation mentale des skippers se valide au fur à mesure des expériences vécues en solitaire, dans les courses servant de préparation au Vendée Globe.
  • Etre accompagné permet de prendre du recul et de maintenir un équilibre vie personnelle – vie de marin. Comme dans tous les projets de vie où la passion l’emporte, c’est important d’apprendre à mieux se connaitre pour rester en accord avec ses valeurs et faire les bons choix!
Les skippers valident les choix techniques sur leur bateau, ils s’occupent maintenant un peu plus du facteur humain, déterminant dans la course en solitaire.

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